Centre Saint Paul

"Vatican II et l'Évangile" - abbé G. de Tanoüarn

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Préface, par l'abbé Régis de Cacqueray

Introduction - Oublier Vatican II ?

Première partie - Le Concile comme paysage
Chapitre 1 - Le chrétien dans le monde
Chapitre 2 - Nouveauté chrétienne - nouveauté conciliaire
Chapitre 3 - La paix du Christ et la paix du Concile
Chapitre 4 - Un nouvel homme, une nouvelle religion

Chapitre 5 - La liberté du Christ et la liberté religieuse

Chapitre 6 - Le culte chrétien et le culte conciliaire

Premier bilan

Deuxième partie - Une clef pour Vatican II

Chapitre 7 - Prélude philosophique
Chapitre 8 - Liberté religieuse, le conflit des interprétations
Chapitre 9 - Vatican II et la transmission de la foi
Chapitre 10 - Liberté et vérité dans l'Évangile
Chapitre 11 - Quel est ce droit ?
Chapitre 12 - Quel est ce Règne ?
Conclusion
Annexes

Liste des abréviations utilisées

 
(C) Abbé de Tanoüarn
12 rue Saint-Joseph
75002 Paris
01.40.26.41.78
Chapitre 2 : Nouveauté chrétienne / Nouveauté conciliaire [suite]

La nouveauté qu'évoque le concile Vatican II n'est pas chrétienne ; elle n'a rien à voir avec cette charité divine qui, nous dit l'Ecriture, renouvelle toutes choses. Elle est empruntée au monde et, comme telle, elle est présentée comme admirable, car, pour le pape Paul VI lui-même, nous l'avons rappelé la semaine dernière, le monde, avec son humanisme sans Dieu, avec son humanisme nouveau, est admirable ; il faut donc que l'Église s'y rallie.

Des textes que nous venons de citer, nous pouvons déjà tirer quelques conclusions sur la « problématique nouvelle », sur les « nouvelles analyses et les nouvelles synthèses » ( 5,3) que proposent les Pères. On peut articuler cette nouveauté en deux champs : le champ politique et le champ spirituel. Vatican II s'est préoccupé de l'un et de l'autre.

Examinons d'abord la nouveauté politique à laquelle le Concile entend faire face : les démocraties ont triomphé en 1945, Pie XII en avait pris acte avec prudence, dans différents radio-messages de Noël en particulier. Selon les Pères conciliaires, le monde qui est né de ce cataclysme est un monde plus uni et plus fraternel. Je cite encore Gaudium et spes : « La conviction grandit que le genre humain peut et doit non seulement renforcer sans cesse sa maîtrise sur la création, mais qu'il peut en outre instituer un ordre politique, social et économique qui soit toujours plus au service de l'homme » (n°9, §1). Et de caractériser l'ordre qui doit naître : « Un grand nombre, prenant conscience des injustices et de la distribution des biens, s'estiment lésés. Les nations en voie de développement veulent participer aux bienfaits de la civilisation moderne tant sur le plan économique que politique, et jouer librement leur rôle sur la scène du monde. Les peuples de la faim interpellent les peuples de l'opulence. Les femmes, là où elles ne l'ont pas encore obtenue, réclament la parité de droit et de fait avec les hommes. Les travailleurs, ouvriers et paysans, veulent non seulement gagner leur vie, mais développer leur personnalité par leur travail, mieux, ils veulent participer à l'organisation de la vie économique, sociale, politique et culturelle... » (§2). Je suis désolé d'avoir à lire un texte si profane dans une enceinte sacrée, mais nous tenons là un tableau assez exhaustif de la nouveauté politique telle que la conçoivent les Pères de Vatican II. C'est la mondialisation heureuse, version "ivresse démocratique" comme dirait Alain Minc. Cette euphorie (tout simplement stupéfiante ou hallucinée) est vraiment caractéristique de l'atmosphère conciliaire. Comment se comportent les Pères par rapport à cette nouveauté socialiste et autogestionnaire qu'ils ont su dépeindre en peu de mots ? Ils volent au secours de la victoire : « En proclamant la très noble vocation de l'homme et en affirmant qu'un germe divin est déposé en lui, le saint synode offre au genre humain la collaboration sincère de l'Église pour l'instauration d'une fraternité universelle. » (§3 n.2). Il y a des moments où la réalité dépasse la fiction. On voit ce que les Pères ont fait de la nouveauté chrétienne en la transposant dans l'ordre politique. Saint Jean, au premier chapitre de l'Apocalypse, explique que « le Christ nous fit Royaume et prêtres pour son Dieu et Père » (Apoc. I, 6). Que reste-t-il du Royaume de Dieu à l'heure où l'Église nage dans la mondialisation heureuse ? Que reste-t-il de ce sacerdoce que le Christ a donné à chacun d'entre nous pour offrir son sacrifice intérieur, en esprit de douceur et d'humilité ? Oui, que reste-t-il en définitive de la nouveauté chrétienne, de cette divine charité, qui, à entendre nos guides, doit se dissoudre dans le nouveau cours de l'histoire et dans la Fraternité universelle qui s'instaure ? quarante ans après ce discours sinistre, je crois que nous pouvons répondre : concrètement, il n'en reste presque rien !

>>Suite>>