Centre Saint Paul

"Vatican II et l'Évangile" - abbé G. de Tanoüarn

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Préface, par l'abbé Régis de Cacqueray

Introduction - Oublier Vatican II ?

Première partie - Le Concile comme paysage
Chapitre 1 - Le chrétien dans le monde
Chapitre 2 - Nouveauté chrétienne - nouveauté conciliaire
Chapitre 3 - La paix du Christ et la paix du Concile
Chapitre 4 - Un nouvel homme, une nouvelle religion

Chapitre 5 - La liberté du Christ et la liberté religieuse

Chapitre 6 - Le culte chrétien et le culte conciliaire

Premier bilan

Deuxième partie - Une clef pour Vatican II

Chapitre 7 - Prélude philosophique
Chapitre 8 - Liberté religieuse, le conflit des interprétations
Chapitre 9 - Vatican II et la transmission de la foi
Chapitre 10 - Liberté et vérité dans l'Évangile
Chapitre 11 - Quel est ce droit ?
Chapitre 12 - Quel est ce Règne ?
Conclusion
Annexes

Liste des abréviations utilisées

 
(C) Abbé de Tanoüarn
12 rue Saint-Joseph
75002 Paris
01.40.26.41.78
Chapitre 9 - Vatican II et la transmission de la foi

On retrouve l'infirmité originelle du libéralisme philosophique dans la justification théologique de Dignitatis humanae, que proposait le Père André-Vincent et que le Père de Margerie a largement reprise. L'un et l'autre, en partant uniquement du texte conciliaire, en arrivent à nier la nécessité de l'autorité dans l'acte de foi. Ils estiment sans doute que cela ne constitue pas un grand dommage, alléguant que l'autorité politique aujourd'hui ne manifestera jamais plus aucune forme de préférence vis-à-vis de la foi chrétienne. Il est vrai que le Père André-Vincent n'était pas homme à majorer les mérites spirituels de la démocratie moderne. Ce n'était pas précisément un démocrate-chrétien. Mais il a manifestement sous-estime le lien entre théorie juridique et projet théologique. Faisant l'impasse libérale sur la question de l'autorité politique, il oubliait ipso facto l'autorité de la Parole de Dieu qui est pourtant la source de la foi elle-même, comme nous l'avons indiqué à la fin du chapitre précédent.

Reprenons, par exemple, le vieux traité du Père Garrigou-Lagrange sur la Révélation (certainement l'une de ses œuvres les plus abouties). Le dominicain nous avertit, dans le roide langage de la scolastique, que le motif formel de l'acte de foi, c'est l'adhésion à l'autorité du Dieu qui se révèle. L'acte de foi, cette prière que nous devrions réciter tous les jours, ne dit pas autre chose : “ Mon Dieu, je crois, parce que vous ne pouvez ni vous tromper ni nous tromper. ”

A en croire Margerie après André-Vincent, la dignité ontologique de la personne humaine doit se manifester dans la libre recherche de la vérité. Cette vision de l'homme est certainement pétrie de bonnes intentions. Mais que devient l'autorité de la Parole divine, seule source de la foi, dans cette perspective ? Certes, ni l'un ni l'autre de ces deux théologiens ne voudraient la nier. Encore moins la renier. Mais, au moment où ils adoptent la théorie conciliaire de la liberté de conscience, ils se condamnent à mettre entre parenthèses l'autorité divine de la Parole qui nous sauve.

Après Vatican II, il ne peut plus être question de l'autorité de Dieu qui seule conduit l'homme au vrai, puisque la liberté laissée à la recherche suffit désormais, paraît-il, pour amener chaque individu à découvrir la vérité surnaturelle. L'autorité de la Parole divine, qui engendre ce que saint Paul appelle “ l'obéissance de la foi ” disparaît au profit d'une sorte d'infaillibilité immanente à toute quête humaine.

Cette attitude est évidemment déraisonnable pour quiconque l'examine sérieusement. Non seulement elle préjuge d'une sorte de bonté native de l'homme, qui est censé aller de lui-même à la vérité (au mépris de ce que la Bible nous enseigne sur le péché originel), non seulement elle confond l'ordre naturel auquel l'homme accède par ses propres forces et l'ordre surnaturel auquel il ne peut s'élever que par la Révélation et par la grâce de Dieu, mais surtout elle fait de la conscience humaine l'unique médiatrice de l'Absolu.

Bien entendu, ni André-Vincent ni Margerie n'ont voulu cela, mais ils y sont contraints par la logique des concepts qu'ils avalisent et par les textes conciliaires qu'ils admettent sans examen. Le paradoxe, s'il était poursuivi jusqu'au bout, indiquerait que ces deux esprits éminemment traditionnels, pour défendre l'autorité traditionnellement reconnue à un concile, en viennent à élaborer une théorie de l'acte de foi au sein de laquelle l'autorité de Dieu n'est plus considérée comme déterminante.

Certains penseront peut-être que j'exagère en radicalisant des concepts qui ne demandaient qu'à rester sagement assis dans leur coin. D'autant qu'ils n'avaient - me dira-t-on ! - aucune force de nuisance.

>>Suite>>