Centre Saint Paul

"Vatican II et l'Évangile" - abbé G. de Tanoüarn

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Préface, par l'abbé Régis de Cacqueray

Introduction - Oublier Vatican II ?

Première partie - Le Concile comme paysage
Chapitre 1 - Le chrétien dans le monde
Chapitre 2 - Nouveauté chrétienne - nouveauté conciliaire
Chapitre 3 - La paix du Christ et la paix du Concile
Chapitre 4 - Un nouvel homme, une nouvelle religion

Chapitre 5 - La liberté du Christ et la liberté religieuse

Chapitre 6 - Le culte chrétien et le culte conciliaire

Premier bilan

Deuxième partie - Une clef pour Vatican II

Chapitre 7 - Prélude philosophique
Chapitre 8 - Liberté religieuse, le conflit des interprétations
Chapitre 9 - Vatican II et la transmission de la foi
Chapitre 10 - Liberté et vérité dans l'Évangile
Chapitre 11 - Quel est ce droit ?
Chapitre 12 - Quel est ce Règne ?
Conclusion
Annexes

Liste des abréviations utilisées

 
(C) Abbé de Tanoüarn
12 rue Saint-Joseph
75002 Paris
01.40.26.41.78
Chapitre 5 - La liberté du Christ et la liberté religieuse [suite]

Comment expliquer cette apparente aversion de saint Paul pour la Loi juive, alors même qu'il a passé sa vie à recommander aux premières communautés chrétiennes de multiplier les bonnes œuvres ? Il ne faut pas confondre ce que l'Apôtre recommande au sujet des œuvres bonnes d'une part, et ce qu'il pense, d'autre part, des œuvres commandées par la Loi juive. Luther a fait cette confusion, qui l'a mené à des interprétations confinant à l'absurde, en offrant l'image d'un théologien qui n'hésiterait pas à se situer "par-delà le bien et le mal". On connaît son apostrophe : " Pèche hardiment et crois plus fermement ! "

Si on lit les épîtres sans préjugés, on ne trouve pas trace du célèbre leitmotiv luthérien sur le salut par la foi seule. Au contraire, saint Paul ne perd pas une occasion de dire à ses fidèles qu'" il ne faut pas se lasser de faire le bien ". " Nul fornicateur, nul impudique, nul avare, c'est-à-dire nul idolâtre, n'ont de part au royaume du Christ et de Dieu " (Eph. V, 5). Le grand prédicateur de l'Évangile note par ailleurs que ceux qui ne sont pas chrétiens peuvent néanmoins suivre la voix de leur conscience (Rom II, 14-15). Pas de trace de jansénisme : saint Paul reconnaît que les païens peuvent avoir de vraies valeurs morales.

Et d'un autre côté, c'est en parlant de la Loi juive qu'il affirme : " Elle a tout enfermé dans le Péché. "

Une telle sévérité s'explique si l'on se souvient que certains juifs confondaient le culte rendu à Dieu avec une pratique compulsive et orgueilleuse des moindres observances de la Torah ; ceux-là avaient tendance à transformer la Loi en une idole, au mépris de l'ordre voulu par Dieu. Certains pharisiens mais aussi des esséniens tombaient dans ce travers du légalisme. On en trouve trace également dans une apostrophe fameuse - et beaucoup plus ancienne - du prophète Jérémie aux habitants de Jérusalem (W, 4), qui imaginent qu'ils ont Dieu avec eux, puisque, conformément à la Loi, le culte divin se déroule dans le Temple.

Le Père Spicq cite quelques textes des Rabbis, dont le formalisme est éloquent. Selon Rabbi Eléazar, Dieu est le premier observateur de la Loi qu'il a promulguée. Selon Rabbi Jehuda, Dieu met tous les jours des phylactères et s'enveloppe d'un vêtement garni de franges. En outre, trois heures chaque jour, il étudie la Torah. Selon Rabbi Isaac, après l'épisode du Veau d'Or, alors que Dieu avait fait vœu d'anéantir les Israélites, il s'est fait relever de son vœu par les Docteurs de la Loi. Dans cette perspective, la question du sexe des anges est en quelque sorte tranchée d'avance, car, selon tel ou tel Maître dans la science de la Torah, les anges sont circoncis et ils observent le Sabbat. Dieu lui-même ne s'est-il pas reposé le septième jour ? Quant aux hommes, s'ils veulent être des justes, ils doivent observer les 613 préceptes de la Torah, (248 positifs et 365 négatifs) à quoi la Tradition ajoute une multitude de prohibitions ou de nouveaux préceptes... Saint Paul a écrit en termes définitifs ce qu'il fallait penser de cette efflorescence de la réglementation pharisaïque : " Le précepte était fait pour la Vie, il me conduisit à la mort. Car le péché, saisissant l'occasion du précepte, me séduisit - comme le serpent séduisit Eve - et par ce moyen me tua " (Rom. VII, 7-12).

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